• "Les rêves d’Élisa" - Chapitre 12

    - Réveille-toi Élisa ! Un petit effort mon ange, ouvre les yeux !

    Prononce la voix bien aimée près de son oreille.

    D’une main il soutient sa tête endolorie, de l’autre, il caresse ses joues glacées.

    - Oui ma vieille, reviens parmi nous ! Allez !

    Ce n’est pas Martha…C’est…C’est… Elle n’est plus sûre de rien. Est-ce vraiment la voix inquiète de Yann, son voisin d’amphi ? En contrepoint de celle-ci, humaine, amicale, résonne une autre voix métallique, inexpressive :

    « Élisa 7 ! Contrôle ! Élisa 7 ! Contrôle ! »

    Non, ce n’est pas possible ! Elle est toujours là-bas, à l’intérieur de la « Sphère ». Elle a rêvé sa fuite…La sortie à l’air libre…

    « NON ! » Hurle-t-elle désespérée. Mais aucun son ne franchit ses lèvres.

    Elle se débat en proie à une terreur sans nom…Prisonnière…En bas…Pour l’éternité.

    « NON ! ».

    Et son propre cri franchit enfin la frontière de son inconscience.

    - Calme-toi ma douce, tout va bien !

    - Jonathan…

    - Oui mon ange, c’est bien moi.

    - Où...Où…sommes…nous ?

    - Tu es rentrée mon amour. Tu es rentrée !

    - Rentrée ? Je…Je …Combien de temps ?

    - Environ dix minutes mon cœur.

    - Seulement ? Pourtant j’ai…Je ne comprends pas…

    - Je sais mon amour. Je t’expliquerai. Élisa…

    - Hum…

    - Je t’aime !

    - Ahhh…Soupire-t-elle émergeant petit à petit de son étrange et oppressant cauchemar. Je…Je crois bien que moi aussi…

    - Ça aussi je le sais. Tu me l’as déjà dit !

    - Vous vous connaissez ? Lance une autre voix où se partagent la surprise et l’indignation. Curieux même qu’elle ne se soit pas encore manifesté !

    C’est Chloé. Elle a dû redescendre vite fait de son perchoir en-haut de l’amphi quand elle a perdu connaissance sans préavis. Son amie aime dominer la situation mais là, elle est dépassée. Ça s’entend à son ton suraigu.

    - Calme-toi Chloé…Implore-t-elle, l’esprit encore confus.

    - Que je me calme ! Un superbe inconnu t’abreuve de petits mots doux et faudrait que je me calme !

    - Pitié Chloé ! J’ai la tête en vrille et un mal de cœur pas possible alors tais-toi ! S’il te plait !

    - Élisa…

    - Tais-toi j’ai dit ! J’ai besoin de récupérer alors arrête de hurler !

    - Eh bien ! Ça va mieux mon cœur ! Tu reprends du poil de la bête on dirait ! Dit Jonathan en riant sous cape de l’air déconfit de Chloé.

    - Là tu abuses Élisa ! On est copines ou quoi ? Tu m’as caché un tas de trucs et je veux…

    - Rien du tout Chloé ! L’interrompt Jonathan sans ménagement.

    - Quoi ?

    Le ton est outragé. La belle n’a pas l’habitude de se laisser intimider par les mecs, même baraqués comme celui-là !

    - Il faut vous calmer mademoiselle ! Vous êtes amies et vous le resterez mais pour l’instant, Élisa a besoin de tranquillité pour revenir tout à fait.

    - Revenir ? Et d’où est-elle censée revenir hein ? Je n’avais pas remarqué qu’elle était partie moi ! Fulmine Chloé au bord de l’explosion.

    - Chlo ! Ça suffit maintenant ! Tu me soûles ! Va faire un tour et reviens quand tu seras capable de parler sans brailler ! Tu es ma meilleure amie, je t’aime mais là, tu me fatigues grave ! J’ai besoin d’un peu de silence pour faire le point.

    - Le point sur quoi ?

    - Stop ! Tu m’agaces à la fin ! Sors ! J’insiste !

    La jeune fille interloquée comprend enfin que son amie ne plaisante pas. Sa pâleur, son air égaré, achèvent de la convaincre. Ça plus le regard de l’inconnu qui s’est considérablement assombri. Elle leur tourne le dos et s’éloigne en maugréant :

    -Toi, tu ne perds rien pour attendre !

    Nouveau soupir. De soulagement cette fois. Elle voudrait se relever mais elle sent bien que ses jambes ne la porteraient pas. Jonathan l’aide à s’asseoir sur le siège qu’elle occupait avant son évanouissement et prend place à côté d’elle. Passant un bras ferme autour de ses épaules il l’attire contre lui. Étourdie, elle se laisse faire.

    - Ça va ? Tu es bien ?

    - Hum hum !

    - Prends ton temps ma chérie !

    - Il a raison ! Appuie une voix pleine de sollicitude.

    - Ah ! Tu es là Yann ! Je t’ai donc bien entendu tout à l’heure !

    - Oui! Tu m’as foutu une sacrée trouille tu sais !

    - J’imagine ! Excuse-moi !

    - Bon ! Je vois que tu vas beaucoup mieux et que tu es en de bonnes mains alors je vais y aller maintenant, OK ?

    - Pas de problème Yann, tu peux partir, je m’occupe d’elle ! Et merci encore ! Acquiesce Jonathan à sa place.

    - De rien monsieur ! Au fait, il y aura cours demain ?

    - Oui, mais pas avec moi ! Et ne m’appelle pas monsieur, je ne suis pas le prof que vous attendiez. C’est drôle, à l’accueil aussi on m’a pris pour lui ! Il n’arrivera que demain à ce qu’il paraît, C’est ce que j’ai cru comprendre en tout cas d’après le coup de téléphone qu’a passé la secrétaire quand je l’ai détrompée !

    - Ah bon ! Ben au revoir alors ! À plus Éli ! Remets-toi bien !

    - À plus Yann ! Je te tiens au courant !

    Rassuré, le jeune homme s’en va rejoindre ses amis qui l’attendent dehors. Il aurait des trucs à leur raconter mais il ne le fera pas. Comme s’il comprenait d’instinct que ce qu’il a entendu, pour étrange que ça ait pu lui paraître parfois, relève de la stricte intimité.

    Élisa et Jonathan sont à présent seuls dans le grand amphi silencieux.

    - Dès que tu t’en sentiras capable, nous sortirons d’ici. L’air frais te fera du bien ! D’accord ma chérie ?

    - Hum hum…

    L’air frais…Le souffle froid qui la fait vaciller… La grande goulée d’air pur, si pur qu’elle avale lorsqu’elle voit…juste avant de perdre connaissance…Là-bas…

    Qu’a -t'elle vu ? Elle ne se rappelle plus. « Ça va te revenir. » Lui a dit Martha. Quand était-ce ? Avant … Quand ils sont sortis tous les trois de…de …Tout s’embrouille dans sa tête où la migraine revient en force.

    - Laisse venir tranquille Élisa !

    - Jonathan…J’ai…J’ai rêvé !

    - Je sais ma douce, je sais !

    - Pourtant, cette fois je ne dormais pas…Et… C’était si…réel !

    - Ça aussi je le sais !

    - Tu sembles toujours tout savoir toi ! C’en est presque énervant ! Comment est-ce possible que tu saches pour mon rêve, mon délire plutôt ?

    - J’y étais !

    - Tu...Tu veux dire…

    - Dans ton rêve, oui ! Et ce n’est pas un délire dû à ta perte de conscience mon amour !

    - Martha aussi ?

    Sa voix n’est plus qu’un faible coassement… Elle va de nouveau s’évanouir…

    Un baiser très tendre, très léger sur ses lèvres décolorées la ramène à l’instant présent. Mais elle sait, elle sent que le rêve est là, à l’orée de sa conscience malmenée. Si elle reperd connaissance ou si elle s’endort, elle y retombe, c’est sûr. Dormir…Elle est si fatiguée soudain. Comme si elle avait couru à perdre haleine durant des heures…

    - Tu as couru mon amour ! Et oui, Martha était là elle aussi !

    - Oh la la ! Je vais devenir folle moi ! Tu…tu veux dire que…

    - Oui oui ! Il va falloir que nous parlions aussi de tes deux autres…rêves ! Mais pas ici. Pas maintenant. Te sens- tu assez de force pour aller jusqu’au parking ?

    Parking...Mémoire ancestrale… virages en pente… course effrénée…

    - Stop Élisa ! Arrête d’y penser ! Il faut vraiment qu’on se retrouve dans un endroit plus confortable pour parler de tout ça.

    - Tout ça quoi ?

    - Ton rêve d’aujourd’hui, les deux autres, notre rencontre…Tout quoi ! Il en va de notre avenir.

    - « Notre » avenir ? Ensemble tu veux dire ?

    - C’est exactement ça ! Ensemble ma chérie ! Ensemble, crois-moi !

    - Tout ça comme tu dis, c’était donc…

    - Vrai ! Aussi vrai que le jour où nous nous sommes rencontrés ! Te souviens-tu ? Simbu…Notre premier baiser…

    - Parce que c’était ce jour-là le premier ?

    - C’était ! Dans la cheminée gravitationnelle, tu t’es demandé si c’était ton premier baiser, n’est-ce pas ? Notre premier baiser. Eh bien non ! Le tout premier, c’était à Sarlat, après « l’attaque » de ce cher Simbu.

    - Et celui de mon dernier rêve…

    - N’était qu’un des…Milliards que je compte bien te donner à partir d’ici et maintenant.

    - Jonathan…

    - Dieu comme j’aime quand tu prononces mon prénom avec cette douceur, cette ferveur, cette attente emplie de questions auxquelles nous allons répondre ensemble mon amour, je te le promets !

    - Roh Ahr Anh…

    - Chut Ehi Sha ! J’ai quelque chose à faire qui ne souffre plus aucun délai ! Si tu as la force de le supporter amour de ma vie.

    - Je…Je crois que je l’aurai. Jonathan…Tu…Tu es bien réel ?

    - Je le suis, sois en sûre ! Affirme-t-il en se penchant vers elle.

    C’est bouche à bouche, étroitement enlacés comme dans son troisième rêve, qu’ils scellent leurs retrouvailles. Les questions attendront.

     

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  • Commentaires

    2
    Samedi 21 Janvier 2023 à 10:38

    Je vais arrêter un peu la lecture, je n'accroche pas pareil cette fois-ci. 

    Bises

    1
    Jeudi 19 Janvier 2023 à 21:04

    Alors, ne les dérangeons pas, amitiés, JB

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