• L'Atelier en question(s)

    Mes réponses aux questions de  l'atelier d'Annick SB

    (Le lien vers l'atelier est inclus dans son nom)

    Je vous invite cordialement à aller voir en quoi  consiste exactement cet atelier . 

    Chaque Question numérotée contient le lien qui renvoie à la question d'origine   dans l'Atelier en question(s)

    Pour suivre plus aisément le récit, chaque épisode se termine  par les mentions >A suivre< et [Précédent].

    Il vous suffira donc de cliquer sur l'une ou l'autre, soit pour découvrir la suite du feuilleton, soit pour revenir en arrière dans le fil de l'histoire.

    Bonne lecture

  • Eh oui, tout arrive à point pour qui sait attendre

    La mise en place de mon propre atelier d'écriture est en effet très très chronophage  !

    Et une ch'tite déprime passagère m'avait de surcroît, coupé quelque peu l'inspiration...

    ***

    Question N° 8 : Elle est bientôt terminée cette partie ?

    ***

     Atout maître… Ou un roi et une reine contre les fous.

     

    Jacob dort comme un bienheureux dans les bras cajoleurs de Martha qui ne cache pas sa joie d’avoir retrouvé son petit loupiot comme elle dit. A vrai dire elle est complètement gaga avec le petit garçon qu’elle considère comme son petit-fils. Elle lui voue un amour sans borne et le bambin le lui rend bien !

    Il y a maintenant 8 jours qu’ils l’ont rejointe dans le refuge où elle se rongeait les sangs en se demandant ce qu’ils devenaient.

    Ils ont quitté Liberté par la mer dans une barcasse qui tenait plus de la coquille de noix que du bateau de pêche auquel est habitué Jonathan ! 

    Élisa ne lui a pas posé de question  quand il lui a annoncé que ça valait mieux que de prendre les sentiers habituels où on risquait de les poursuivre !  Si naviguer de nuit ne l’enchantait pas, elle a néanmoins admis qu’en effet, c’était la meilleure solution, surtout quand Jonathan lui a fait part de son plan, même si elle a rechigné en l’écoutant l’exposer :

    -Nous allons leur faire croire que nous avons péri en mer  au cours de notre fuite !

    -Ils ne seront pas dupes !

    -Mais si, crois-moi ! Quand ils verront qu’aucun des bateaux de pêche ne manque, ils comprendront que nous sommes partis avec cette embarcation peu fiable  dont plus personne n’ose se servir.  Il va y avoir de la houle cette nuit, c’est prévu !

    - Il faut être fou en effet ! Que nous prenions des risques, je peux le concevoir mais tu as pensé à Jacob ?

    -  Bien sûr que j’y pense ! Pour le sauver, nous devons les prendre ces risques ! Si Martha n’avait pas mesuré l’ampleur du danger qui vous menaçait Jacob et toi, elle n’aurait pas quitté Liberté. Elle a compris qu’en s’échappant, elle allait déstabiliser  Andrew et ses acolytes, les obligeant à réviser leurs plans ! Tu peux être sûre que sinon, ils t’auraient fait disparaître toi aussi, sans attendre mon retour. Mon absence les arrangeait bien et tant qu’ils avaient Martha dans leur jeu, ils pouvaient tout se permettre !

    - Tu as sans doute raison !

    -J’ai raison ! Pense à Soraya et aux jumeaux !  Alors que chaque enfant de Liberté est si précieux pour notre avenir, ils n’ont pas hésité à les faire disparaître ! Ils en auraient fait autant pour toi et notre fils, avec d’autant plus de détermination que tu  devenais une menace pour eux ! S’ils  n’ont rien tenté avant, c’est probablement parce qu’ils voulaient  d’abord découvrir pourquoi leur drogue ne fonctionne pas sur toi ! Tu es un cas unique ma douce ! Même moi je n’y ai pas résisté au début !

    -Tu parles d’une drogue, mais quelle drogue ? Comment peuvent-ils l’administrer à toute la population en même temps ? Droguent-ils les enfants aussi ?  Ont-ils une raison  précise pour avoir fait disparaître les personnes cochées sur ma liste, ou les choisissent-ils au hasard ? Quel est le but de tout cela ?

    -Je ne sais pas mon amour, c’est ce que nous devons découvrir ! Voilà aussi pourquoi nous devons partir, vite !

    -Une dernière question Jonathan ! Deux plutôt ! Tu parles d’une partie engagée entre nous et  Andrew et sa bande, peux-tu me dire si elle est bientôt terminée cette partie ?

    - Je ne peux répondre à cette question ! Si j’en étais capable, nous ne serions pas obligés de fuir pour  avoir une chance de trouver ces réponses ! l’autre question ?

    -Que fais-tu de Khaled ? Il te connaît mieux que personne ! En constatant ta fuite, il comprendra que tu l’as berné et il ne te lâchera plus !

    - Ça ma chérie, c’est un problème réglé ! L’as-tu vu depuis notre retour ?

    - Non, en effet ! Je pensais qu’il avait rejoint Mélodie !

    -Tu ne t’es pas dit qu’il aurait dû être avec ses comparses ?

    -Oui.. Non… je ne sais plus ! J’étais tellement heureuse de te voir que  je n’ai pas vraiment fait attention !

    --Eh bien ma douce, ce cher Khaled nous attend !

    -Comment ça il nous attend ?

    - Oui, il part avec nous ! Bon, il est un peu sonné, d’accord ! C’est que Martha m’a appris quelques trucs si tu vois ce que je veux dire, alors il dort comme un bébé et il va dormir pendant un bon bout de temps ! Ligoté bien sûr !

    -Pourquoi l’emmener avec nous ?

    -C’est une carte dans notre jeu ! Un atout maître !

    -Il est dangereux !

    -Il le serait bien d’avantage en restant avec ses complices !

    -Les habitants de Liberté vont s’apercevoir de sa disparition ! Et de la nôtre !

    -Même pas ! Ont-ils fait la moindre remarque sur celle de Martha ? La drogue annihile leur perception. Ils n’auront pas à nous oublier parce qu’au même titre que les autres disparus, nous n’aurons jamais existé pour eux !

    -Mais  Andrew, Septime et Serena…

    - Eux sauront bien sûr ! Ils comprendront que nous avons pris Khaled en otage et que ce traître aura péri en même temps que nous !

    -Comment ?

    -Quand ils verront les débris de notre piteuse embarcation !

     

    Et le plan de Jonathan a fonctionné à merveille. Un plan qu’il avait minutieusement préparé, avant son départ pour la chasse, après avoir surpris tout à fait  par hasard, une conversation édifiante entre  celui qu’il croyait être son ami depuis toujours et la bande des trois « maîtres » de l’Arche, quelques jours après qu’Élisa ait lancé sa bombe lors de la fameuse réunion du Conseil de la Communauté.

    Bien qu’il soit encore sous  l’influence de la drogue, il n’avait retenu qu’une chose : on voulait faire du mal à l’amour de sa vie !

    -Ça ne marche pas avec Élisa ! Avait jeté cette garce de Serena

    -Il va peut-être falloir  s’en débarrasser ! Avait  suggéré Septime d’un ton froid !

    -Comme pour les autres ? Avait demandé Andrew

    - Avec Jonathan dans les parages, ça risque d’être difficile ! On a beau le tenir comme les autres, il est plus résistant et il est très épris d’elle ! avait argué Septime.

    -De  toute façon avant d’agir, il faut qu’on essaye de comprendre pourquoi ça ne fonctionne pas sur elle. Et pour ça, il vaudrait mieux qu’il ne soit pas présent. Avait ajouté Serena.

    -J’ai une idée, avait proposé Khaled.  Je l’emmène à la chasse avec Rafaël !  Il ne refusera pas ! Il faut profiter du fait qu’il avait l’air assez décontenancé et énervé contre elle quand elle a parlé des disparitions ! Je pense même qu’il sera soulagé de s’éloigner d’elle un moment !

    C’est cette trahison qui l’avait « dessoulé » s’i l’on peut dire. Alors il avait joué leur jeu, tout en préparant ses propres coups, comme un joueur d’échec !

    Non, il ne savait pas quand allait  finir la partie, mais il était prêt à tout pour qu’elle se termine à son avantage

     

    Dans le petit bateau, ils n’ont embarqué que le strict nécessaire pour un voyage somme toute assez court par la mer, plus quelques bagages qui seraient sacrifiés  pour  duper leurs adversaires. Et bien sûr, un Khaled profondément endormi, saucissonné dans une couverture. Comme s’il avait compris, Jacob a été sage comme une image. A la lueur de la lune, ils ont navigué sur le flot houleux, jusqu’à un ilot connu d’un seul équipage de pêcheurs, celui que formaient habituellement Jonathan, Rafaël et Khaled, sur le « Liberté »

    Une cabane au confort rudimentaire les attendait et une autre embarcation bien plus solide pour les amener à bon port. Après avoir installé  sa femme, son fils  et leur prisonnier à l’abri,  Jonathan est reparti à l’assaut des vagues, traînant derrière lui la barcasse contenant les bagages leurres.

    A bonne distance de l’îlot, il a percé le fond d’un coup de hache, fracassé la coque, puis il l’a détachée et laissée partir à la dérive. L’océan et quelques écueils  ont fait le reste.

    Jonathan savait que les courants à cet endroit précis, allaient ramener les débris de l’épave vers le rivage de Liberté.

    Après une journée de repos, ils ont repris la mer. Il ne leur a fallu que quelques heures pour rejoindre la côte, au plus près du refuge de Martha. Et seulement une demi- journée de marche pour l’atteindre enfin,  avec un Khaled tenue fermement en laisse par Jonathan, et  qui avançait l’air hébété, tel un zombie, sans comprendre encore ce qui lui arrivait.

    Quant à Jacob qui n’avait jamais quitté Liberté, du haut de ses 2 ans, il semblait s’émerveiller de tout.

    >A suivre<                                                    [Précédent]        

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  • Question N°7 : Dites-moi, c’est grave ou pas ?

    ***

    Les dés changent de main

     

    La réaction du Doyen ne se fait pas  attendre. S’il a paru totalement décontenancé devant Jonathan, il  reprend très vite du poil de la bête !

     N’est-elle pas allée trop loin avec sa petite comédie ?

    - Martha espèce de folle ! Tu sais très bien de qui je parle ! Elle vivait chez toi depuis plus d’une semaine !

    Au point où elle en est et à voir l’expression  fermée de Jonathan, elle peut tout aussi bien continuer le jeu qu’elle a commencé. Après tout, elle ne sait pas encore s’il est toujours sous influence.

    -Je ne connais aucune Martha ! Je suis seule chez moi avec notre fils depuis le départ de Jonathan ! Tu es bien  placé pour le savoir Andrew ! Après la réunion que j’ai si inconsidérément convoquée, j’en conviens, plus personne ne m’adresse la parole ! On m’évite comme la peste ! Et on ne me laisse plus participer aux activités de la Communauté !

    - A quoi t’amuses-tu petite écervelée ? Tu vois disparaître des gens qui n’existent pas et tu ne te serais pas aperçue de celle de Martha, qui est bien réelle, elle ! Á qui voudrais-tu faire croire ça ?

    - Je ne cherche pas à vous faire croire quoi que ce soit ! En quoi cette..Martha serait-elle plus réelle que mes « disparus » ?  Vous êtes peut-être tous devenus  aussi fous que moi !

    -Et Jonathan qui vient tout juste de rentrer après une absence de presque un mois, tu penses qu’il est fou lui aussi ?  Tu l’as bien entendu demander des nouvelles de Martha ! Argumente une Serena qui reprend pied à son tour !

    -Pas du tout ! Je remontais tranquillement de la plage quand j’ai entendu  sa voix de loin. Ses cris ont même réveillé notre fils. J’étais si heureuse qu’il soit enfin rentré ! En m’approchant, je vous ai vus tous les quatre.  Vous sembliez vous  disputer et vous parliez d’une disparition Vous pensez bien que vu les circonstances, cela a fait plus que m’intriguer !

    -Tu mens ! Hurle Septime qui de pâle est passé à rouge de fureur !

    Elle se moque qu’ils croient ou non à sa version. Ce qui l’inquiète, c’est la non réaction de Jonathan. En apparence du moins, car ses poings serrés et les veines gonflées  de son cou démentent ce calme de surface. Il va exploser d’un instant à l’autre. Sera-ce contre elle ou contre ceux qui accusent sa femme de mensonge et de folie ? Elle préfèrerait ne pas le savoir tout de suite.

    - Jonathan, nous devons te parler ! Il y a urgence ! Intervient Andrew.

    Sent-il que la situation leur échappe et qu’ils n’ont plus le contrôle sur l’esprit de son compagnon ? 

    Il y a urgence en effet !  A l’éloigner des trois comploteurs ! Il faut qu’elle puisse très vite et le plus calmement possible, lui expliquer les choses de son point de vue, partagé par Martha  désormais. Elle se doit aussi de le rassurer sur le sort de leur vieille amie. Il faut qu’elle parvienne à le convaincre qu’elle n’a pas disparu mais qu’elle est partie de son plein gré, persuadée que c’était la seule façon de se protéger et de les protéger, elle et leur petit Jacob.

    - On y va maintenant ! Insiste Septime.

    La peur  qu’elle avait réussi à juguler en entendant la voix de son homme, remonte en flèche ! Désespérée, elle lui jette un regard de muette supplique. Tout son être tendu vers lui, crie « Viens ! »

    Comme s’il l’avait entendue, il pose enfin sur elle l’émeraude de ses prunelles acérées.

    -Dites-moi, c’est grave ou pas, si je préfère passer un peu de temps avec ma famille avant les discussions sérieuses ?  Parce que s’il y a une urgence pour moi, c’est bien de serrer ma femme et mon fils dans mes bras ! La vôtre attendra !  Assène-t-il d’un ton dédaigneux aux trois comparses estomaqués.

    - Mais.. Martha… Bégaie Andrew décomposé

    -Vous n’avez rien fait depuis 8 jours ! Cela aussi peut donc attendre, au point où on en est à cause de votre négligence !

    Et là-dessus il  s’approche d’elle et passant un bras ferme autant que possessif autour de ses épaules,  il l’entraîne sur la route qui mène à leur foyer !

    -Jonathan… il faut que je te dise…

    -Plus tard ma chérie ! Quand nous serons chez nous, à l’abri des oreilles indiscrètes. L’interrompt-il.

    - Tu.. Tu ne m’en veux plus ?

    - Plus tard je te dis ! Fais-moi confiance.

    Puis, sans se soucier de ceux qui les épient, avec précaution pour  ne pas étouffer leur fils, il la prend dans ses bras et l’embrase avec une passion qui n’a rien de feint.

    Á peine sont- ils rentrés chez eux, que toute la tension  accumulée depuis le départ de Jonathan, se relâche d’un seul coup.

    Elle se serait effondrée s’il ne l’avait pas retenue fermement contre  lui.

    -Là… Là.. Tout va bien aller à présent mon amour ! Lui murmure-t-il apaisant

    Accroché aux longues jambes musclées de son père, Jacob gazouille :

    -Papa, papa. Zacob veut bisou…

    - Bien sûr mon bonhomme ! Papa va te manger de bisous ! Lui répond-il envahi de tendresse.

    -Il a retrouvé le sourire ! Si tu savais comme il a pleuré en ton absence ! C’est son tour de câlins maintenant !

    Dit-elle en se détachant de lui. Puis, encore tremblante, elle va s’asseoir dans le rocking-chair qu’il a fait pour elle à la naissance de Jacob.

    - Je  me doute ma chérie ! Pardonne-moi ! Nous allons rattraper  un peu du temps perdu avec mon petit pirate, puis nous discuterons ! Je crois que nous avons des choses importantes à nous dire !

    -D’accord mon amour !

    Les retrouvailles entre le père et le fils sont si émouvantes qu’elle a bien du mal à retenir ses larmes !

    Le reste de la journée s’est déroulé sans anicroche

    Personne n’a osé venir relancer Jonathan chez lui.

     Mais Élisa sait que ses ennemis ne renonceront pas si facilement. Ils ont probablement compris avant elle, qu’ils n’avaient plus aucun pouvoir sur Jonathan ! La seule chose qu’ils ignorent et qu’elle, sait à présent, c’est, en utilisant leur propre terme, qu’ils ne l’ont pas « tenu » autant qu’ils le pensaient.

    Quand il est parti avec Khaled et Rafaël, il ne subissait déjà plus leur funeste emprise.

    -Pourquoi es-tu parti alors ?

    -Pour donner le change ! Pour qu’ils croient que  j’étais toujours sous influence. Au même titre que Rafaël.

    - Parce que Khaled…

    - Khaled fait partie de leur complot. Si j’avais refusé de partir,  ils auraient compris que  leur truc ne fonctionnait plus sur moi. Khaled était en quelque sorte, mon sauf-conduit. J’ai joué consciencieusement le zombie que j’étais censé être. Il n’y a vu que du feu  ce traître !

    - Comment nous tiennent-ils et pourquoi cela ne marche-t-il pas avec moi ?

    -C’est là tout le nœud de l’histoire mon amour : Il faudra que je t’explique mais là, nous allons d’abord devoir agir, vite, très vite.

    -De quelle façon ?

    - En partant rejoindre Martha !

    - Quand ?

    -Cette nuit-même. Alors, comme elle te l’a dit, nous aviserons. Les dés changent de main ! Nous reprenons la partie Élisa !

    >A suivre<                                                                                             [Précédent]


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  • Question N°6 : Cela fait longtemps qu’elle ne vous donne plus de ses nouvelles ?

    ***

    Nouvelle disparition et retour inespéré

     

    Voilà bientôt une semaine que Martha a quitté Liberté pour son refuge. Elle doit maintenant y être installée, à l’abri, loin du danger que représentent à la fois le village et les trois personnages qui le dirigent  en sous-main. Andrew, Septime et Serena. Parce qu’ils le dirigent, Élisa n’en doute plus à présent !   Dans le plus grand secret, ils s’en sont instaurés les maîtres, contrevenant ainsi à  la Loi admise par tous lors de la création de cet espace de vie, hors de l’Arche : pas de Chef. Tout ce qui s’y décide est discuté et mis par écrit à l’issue des Conseils de Communauté. L’unique prérogative reconnue, est celle d’Andrew, qui en tant que doyen d’âge, 51 ans, soit tout juste un an de plus que Martha, préside et anime les débats.

    Une semaine qu’Élisa est seule face aux regards de plus en plus noirs  des habitants du village. Plus rejetée que jamais par ces gens qui se sont auparavant toujours montrés amicaux avec elle, elle se sent pire qu’une pestiférée !  Et Jonathan qui  ne revient pas !

    « S’il lui était arrivé quelque chose ! » Ne peut-elle s’empêcher de se demander.

    Rongée par l’inquiétude, elle attend son retour  en guettant les réactions de ses trois ennemis concernant l’absence de Martha. Le fait qu’ils ne l’aient pas encore interrogée à son sujet, ajoute à  cette angoisse permanente ! Ils doivent pourtant s’être aperçus que leur « espionne » n’est plus à, son poste de garde !

    Elle s’attend à chaque instant à les voir débarquer chez elle mais curieusement, ils restent à distance. Cette « disparition » qu’elle n’a pas criée sur les toits, doit les interroger ! Surtout s’ils sont responsables des autres !

    Elle n’a plus rien à faire. On ne veut plus d’elle pour les travaux communautaires ! Croient-ils donc, tous autant qu’ils sont, qu’elle peut les contaminer avec ce qu’ils appellent sa folie ?

    Elle entend bien ce qui se murmure sur son passage : « Elle a perdu l’esprit ! Jonathan ne s’y est pas trompé ! Il y a fort à parier qu’il se choisira une autre compagne à son retour ! »

    S’ils avaient raison, elle en mourrait !

    Mais le pire, c’est la conversation qu’elle a surprise  entre Mélodie, son ex meilleure amie, et Shana, la compagne de Rafaël , alors qu’elle se rendait  à la plage avec Jacob :

    -Tu crois qu’on devrait laisser le fils de Jon’ avec elle ! C’est malsain non pour ce pauvre petit ! Demandait Shana.

    -Tu as sans doute raison ! On soumettra la question au prochain Conseil, acquiesçait Mélodie.

    - Je pourrais m’en occuper moi, reprenait Shana. En tout cas en attendant le retour de Jon’ !

    Cette chère Shana, si serviable ! D’autant plus prête à se dévouer qu’elle ne parvient pas à avoir un enfant avec son cher et tendre Khaled !

    Depuis, Élisa ne fait plus rien sans son fils. Elle l’emmène partout avec elle et le surveille jalousement. Quand vient le soir, elle se barricade chez elle, paniquée à l’idée qu’on vienne le lui enlever. Il est  plus grognon que d’ordinaire depuis que son père est parti.  Souvent,  il s’accroche à elle  en bredouillant «  Veux papa...Veux papa » entre deux crises de larmes. Il a beau n’avoir que deux ans, il subit de plein fouet l’ambiance délétère dans laquelle elle l’oblige à vivre.

    « Les enfants ressentent plus de choses que nous ne pouvons l’imaginer » Lui a  expliqué Martha un jour.

    Elle avait tellement raison ! La mielleuse Shana aussi, avec son « pauvre petit ». Jacob est malheureux !   Á part le bercer entre ses bras en lui susurrant des mots consolateurs, elle ne peut pas faire grand-chose. Et surtout pas lui rendre son papa !

    Un nouveau matin se lève sur Liberté. Le huitième depuis le départ de Martha. Le vingtième depuis celui de Jonathan. Elle étouffe dans la maisonnette où elle vit en recluse et sur le qui-vive  les trois-quarts du temps. Elle a besoin de sortir. Jacob aussi ! La journée va être belle ! L’air est déjà très doux. Ça sent l’été. Après une toilette et un petit-déjeuner rapides pour elle et pour son fils, elle l’attache dans le porte bébé et sors de la maison, bien décidée à ne laisser personne leur gâcher cette matinée.

    C’est donc d’un bon pas et sans se préoccuper des regards  peu amènes,  que les rares villageois déjà  sortis de chez eux pour vaquer à leurs occupations, lui jettent au passage, qu'elle se dirige vers le chemin qui mène à la plage. Elle arrive devant la maison d’Éléonore, une autre très bonne amie de Mélodie.  Habituellement, à cette heure et en cette saison, elle est assise  dehors sur la petite terrasse en bois, à tresser les jolis paniers qui font sa renommée à Liberté. Or, elle n’y est pas. Et aucun bruit ne parvient de la maison. Sur la route, Mélodie se dirige vers elle. Elle va  bien voir qu’Éléonore n’est pas là. Presque à l’arrêt, elle retient son souffle. Parvenue à sa hauteur, Mélodie fait un écart et passe sans s’arrêter. Pas un regard pour elle, pas un signe de tête. Et, plus étrange, pas un regard sur la maison de la vannière !

    Ce qu’elle craignait depuis le départ de Martha s’est produit .Éléonore s’est volatilisée Pour Mélodie, pour les habitants de Liberté, elle n’a jamais existé. Ses paniers ne manqueront à personne.

    Le cœur d’Élisa bat la chamade. Se taire… Faire comme si… Suivre les conseils de Martha. Elle poursuit son chemin.

    Sa matinée à la plage avec Jacob se déroulera comme les autres, en apparence. Elle y sera seule jusqu’à ce qu’elle décide de rentrer. Pour une fois, sa solitude forcée aura du bon, parce qu’elle aurait eu bien du mal à masquer son désarroi.

    Il est presque midi au soleil lorsqu'elle quitte la plage à regret.

    Ces quelques heures lui ont fait du bien en dépit de cette nouvelle disparition inquiétante.

    Elle refait le compte de ceux qui ne sont même pas des fantômes : Annaëlle, Djibril, Mélissa, Kumba, Lukas, Soraya et ses deux enfants, Leila et Léo, les adorables jumeaux ! Et maintenant, Éléonore !

    Pourquoi ces personnes ? Qu’ont-elles en commun qui expliquerait leur disparition ? Qui aurait voulu les faire disparaître ? Et enfin, comment est-il possible d’escamoter ainsi des gens,  aussi rapidement, sans qu’ils laissent la moindre trace, que ce soit matériellement ou dans la mémoire de ceux qui les côtoyaient encore la veille ?

    Tandis que perdue dans ses pensées, elle remonte le sentier sablonneux qui mène au village, Jacob qui s’était endormi dans son giron, se réveille soudain et se met à babiller

    -Papa.. papa

    Il a entendu la voix chérie avant elle.

    Elle tonne aux abords de la Maison Commune où trois personnes se tiennent l’air pas très rassuré, devant un Jonathan en colère :

    -Comment ça, Martha a disparu ? Ça fait longtemps qu’elle ne vous donne plus de ses nouvelles ?

    -Pas très longtemps non ! A peu près une semaine ! Bredouille piteusement Andrew.

    Le cœur d’Élisa fait un double bond dans sa poitrine ! Jonathan est de retour et les trois larrons qui  ont curieusement omis de la  questionner sur l’absence de Martha, viennent d’avouer à  son compagnon bien aimé,  l’étrange disparition de la guérisseuse.

    - Une semaine ! Et vous n’avez envoyé personne à sa recherche ?

    - C’est-à-dire que.. Euh.. Nous l’avions commise à la surveillance d’Élisa... Bafouille à son tour Serena.

    - A la surveillance de ma femme ? Et pour quelle raison s’il vous plaît ?

    - Enfin, tu sais bien Jonathan ! Ses histoires fantaisistes de disparitions… Tente d’expliquer Septime, qui n’en mène pas plus large que les autres devant cet  homme qu’ils disent « tenir ».

    Où sont passés les trois comploteurs arrogants qui décidaient de son sort sans état d’âme ?

    Elle sent qu’elle a une carte à jouer, là, maintenant. Elle s’est rapprochée subrepticement. Personne ne s’est encore aperçu de sa présence..

    -Oh ! Mon amour, te voilà rentré, enfin ! Lance-t-elle à la cantonade, Faisant sursauter les trois comparses qui ne l’ont pas entendue arriver.

    Puis, avant que Jonathan, surpris,  n’ait eu le temps de réagir,  elle demande  innocemment :

    - Qui a disparu ?

    Andrew, Serena et Septime, se regardent interloqués.

    - Martha ! Tu devrais le savoir jette Andrew d’un ton hargneux !

    - Martha ? Quelle Martha ? Je ne connais personne de ce nom. Questionne –t-elle, jouant à la perfection l’étonnement le plus total.

    Contre son cœur, caché au chaud par le corps potelé de Jacob, il y a la liste dûment complétée des habitants de Liberté, où elle a coché le nom d’Éléonore, la dernière disparue.

     >A suivre<                                                                      [Précédent]

     


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  • Question N°5 : Pourquoi avoir choisi cet endroit ?

    ***

    Délit de fuite et début de piste

     

    Martha est partie.

    Le jour se levait à peine quand elle a quitté la maison après un dernier  baiser léger sur le front de Jacob endormi. Puis elle a serré Élisa très fort  dans ses bras et son sac bien arrimé sur le dos, elle s’est éloignée dans la pénombre, persuadée qu’elle sera hors de danger dans le refuge. Hors de portée d’Andrew et de ses deux acolytes mais également à l’abri d’une disparition intempestive, quelle qu’en soit l’origine. Elle ne doute plus à présent, que des gens disparaissent mystérieusement et que dieu seul sait pourquoi, Élisa est l’unique personne à s’en apercevoir. Elle s’est prise à la croire, sans preuve aucune, incapable de comprendre comment il est possible que ces habitants qu’elle est censée connaître, n’aient laissé aucune trace dans sa mémoire après qu’ils se soient proprement évaporés. Aucune trace dans la sienne, aucune dans celles des autres habitants de Liberté.

    Elle ne s’explique pas vraiment ce soudain revirement, ni cette intime conviction que la jeune femme dit la vérité.

    Au départ, chargée par Andrew de la surveiller étroitement, elle s’est donné pour mission, d’entrer dans son jeu pour s’assurer qu’elle n’était pas sous une quelconque influence.

    - Elle a dû être manipulée par quelqu’un pour inventer cette folle histoire. A insinué Septime pour l’inciter à accepter.

    - C’est pour son bien tu sais ! Comment veux-tu l’aider si tu ne sais pas pourquoi elle agit de la sorte ! A renchéri Serena

    Alors qu’elle regimbait à l’idée d’espionner celle qu’elle considère comme sa fille, cet  ultime argument a emporté son adhésion.

    Aujourd’hui, tandis qu’elle marche sur le sentier qui mène au refuge, elle se demande ce qui l’a réellement poussée à les croire aussi facilement.

    Parce qu’enfin, pourquoi aurait-on manipulé une seule personne, apparemment dans le seul but de  déstabiliser la Communauté de Liberté ?

    Qui et surtout, dans quel intérêt ?

    Jonathan, dont l’absence est plus qu’étrange en ce moment crucial ?  Il aurait dû être là, au contraire au moment où elle avait le plus besoin de lui.  Si ce n’est pour accréditer les dires de  sa compagne, au moins pour la soutenir, essayer de la comprendre et surtout l’aider à élucider le mystère.

    Pour être plus prosaïque, si combine louche il y a, comme elle l’a pensé au début,  il devrait être là et marcher à fond dedans !

    Son départ est devenu à ses yeux, aussi inexplicable que les « disparitions » D’Élisa ! Parce  qu’il  est trop épris de sa « femme » comme on disait dans l’ancien Monde, pour l’avoir abandonnée dans une situation aussi inextricable !

    Sans compter qu’à moins d’être un comédien hors pair, il n’a pu feindre aussi parfaitement sa stupéfaction et son désarroi quand elle a annoncé les premières disparitions. Elle revoit encore le regard chargé d’un mélange d’incompréhension et de reproche, qu’il lui a jeté quand elle s’est adressée à l’assemblée !

    Comme elle-même, comme tous les autres, il n’a rien compris à ce qu’elle racontait. Pas plus que l’ensemble des villageois, il ne connaissait les noms qu’elle donnait  comme étant  ceux des pseudos disparus.

    Pour être parti aussi vite après la fameuse réunion, il faut qu’il ait été bougement convaincu, que s’éloigner d’elle était la meilleure solution. Et pour cela, il faut surtout qu’ « on » l’ait  aidé à s’en convaincre ; Or, pour qui connait Jonathan aussi bien qu’elle et depuis si longtemps, le jeune homme au caractère bien trempé et à la volonté de fer, n’est pas du genre à se laisser manipuler aussi aisément, lui !

    Tout tend à prouver qu’il souffre du même mal que  tout le monde à Liberté.

    Tout le monde ? Pas si sûr.

     Qu’en est-il de Khaled ?

    Elle se rappelle parfaitement les propos de Serena : « Khaled nous soutiendra… » N’a-t-elle pas ajouté qu’ils  les tenaient Jonathan et elle.

    Pour ce qui est de Rafaël, qui est  comme un frère pour Jonathan, elle croit se souvenir qu’il a eu  la même réaction stupéfaite que les autres, le jour de l’annonce effarante d’Élisa. S’il y a eu manigance, il n’en fait pas partie ! Mais il semblait plausible qu’il parte avec ses compères habituels ! Le contraire aurait paru suspect, ces trois-là sont inséparables depuis leur arrivée à Liberté.

       Quatre jours qu’elle chemine, ne s’arrêtant que pour manger et pour dormir. Elle a toujours été une bonne marcheuse. Dans l’ancien Monde comme depuis qu’elle s’est « réveillée » dans ce pays redessiné par dix siècles d’absence humaine, qu’ils appellent la nouvelle France.

    Le refuge n’est plus loin.

    - Pourquoi avoir choisi cet endroit plutôt que ta  cabane dans la forêt ?  Lui a demandé Élisa la veille de son départ

    - Trop près, trop dangereux Élisa, tu le sais bien !

    -Je pourrais venir avec toi dans ton refuge ? Avec Jacob !  Nous serions en sécurité loin de Liberté !

    -Pas possible ! Pour que notre plan fonctionne, il faut que je disparaisse. Je subodore que nos trois comploteurs sont pour quelque chose dans ce truc que je ne m’explique pas. Cette idée de faire une liste était un coup de génie ! Mais si je reste et qu’il y a de nouvelles disparitions, je crains de ne pas t’être d’un grand secours ! Tu auras beau montrer le papier avec ma signature, même moi, je ne te croirais pas. Plus j’y réfléchis, plus je pense que tu as raison. Des personnes disparaissent et tu es la seule à t’en rendre compte. Pourquoi ? Là est la question ! Si tu viens avec moi, nous ne saurons jamais le fin mot de l’histoire !

    - Tu me crois ! Tu me crois vraiment ! Quel soulagement ! Je finissais par penser que j’étais en train de devenir folle !

     -Je ne sais pas si tu ne deviens pas folle  en réalité ! Mais je ne sais pas non plus, si ce n’est pas au contraire tout le village qui l’est devenu !  Tu sais mon petit,  une autre question me taraude depuis que tu as proposé de faire une liste des habitants. Pourquoi n’avons-nous pas de registre à Liberté ? Dans l’ancien Monde, c’était une chose acquise. Naissances, décès, nouveaux arrivants, nombre d’habitants…Tout était consigné! Des recensements réguliers étaient organisés pour suivre l’évolution de la population. Et ici, dans le seul lieu habité de l’ancienne France, nous n’avons rien ! Peut-être sommes nous les derniers humains de la planète  et nous ne sommes pas fichus d’avoir un registre avec nos noms dûment inscrits, même ceux de nos si précieux enfants ! Sommes-nous redevenus des sauvages ? Ou est-ce une volonté délibérée de nos pseudos édiles de ne rien noter nulle part. Ceci expliquerait cela.

    - Ce que je crois- moi, c’est que ce genre de registre existe et qu’ils l’ont détruit ou escamoté pour que nul ne puisse le consulter ! J’ai peur Martha, j’ai vraiment peur ! Parce que quoi qu’ils manigancent, cela n’explique tout de même pas ces disparitions soudaines !

    - Je sais ! Pourtant, tu dois rester à Liberté et attendre le retour de Jonathan qui ne devrait plus tarder. S’il y a d’autres disparitions d’ici là, note- les scrupuleusement pour que nous puissions comparer avec la liste. N’en parle à personne et fais profil bas. Quoi qu’il arrive, ne dis plus rien sur ces disparitions. Laisse les habitants te prendre pour une folle et garde courage, nous finirons par  découvrir  la vérité sur toute cette affaire.

    -Mais je vais être totalement isolée sans toi !  Et si Andrew et les autres décident de mettre leur projet à exécution, tu ne seras pas là pour les en empêcher !

    - Je ne serai pas si loin ! Et ils ne feront rien tant qu’ils ne m’auront pas retrouvée, j’en suis persuadée. Je commence à croire que  si je quitte le village, ils ne me « tiendront » plus, comme ils disent. Ça peut leur foutre sacrément les jetons ! Et  Jonathan en est éloigné depuis plus d’une semaine, aussi ne  doivent-ils plus avoir autant d'influence sur lui non plus.

    -Tu crois ?

    -J’en suis presque sûre ! Dès qu’il sera de retour, s’il y a eu un nouveau cas de disparition, dis-le lui aussitôt, donne lui le nom du ou de la disparue et montre–lui notre liste avant qu’il ne subisse derechef l’influence du village. Puis venez me rejoindre sans attendre. Nous aviserons alors !

     

    Quatre jours que la pauvre petite est seule face à de redoutables adversaires. Elle ne sait que trop à quel point ils peuvent se montrer dangereux. Elle   sait, parce qu’elle les connaît depuis des siècles.

    >A suivre<                                                                         [Précédent]


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  • Question N° 4 :Vous croyez que ça va être possible ?

    ***

    Complot

     

    -Ce qui me semble le plus évident, mais aussi le plus urgent, c’est de faire  une liste écrite de tous les habitants de Liberté ! Un document noir sur blanc ne pourra être mis en doute, surtout si c’est toi qui le produis ! Tu connais tout le monde ! Ça ne devrait pas nous prendre si longtemps ! Mais il nous faut le faire très vite ! Le temps presse Martha , tu dois me croire !

    - J’ai bien du mal mon petit mais je t’ai promis mon aide et je m’y tiendrai ! En revanche, ne penses-tu  pas qu’il faudrait d’abord que tu vérifies qu’il n’y a pas eu  une autre « disparition » !

    -Inutile !

    - Et pourquoi donc ?

    -Parce que si je me fie à ce qu’il s’est passé jusqu’à celle de Soraya et de ses deux enfants il y a trois jours, ces disparitions se produisent au minimum à une semaine d’intervalle.

    La guérisseuse ne peut retenir un mouvement de recul à la mention de cette femme  qu’elle ne connaît pas. Pas plus qu’elle ne connaît ses deux enfants supposés. A son grand désespoir, Baptiste n’a pas encore trouvé chaussure à son pied dans la gente féminine de Liberté ! Il reste l’un des rares célibataires de leur Communauté de survivants !

    La réaction de sa vieille amie n’a pas échappé à Élisa qui s’en attriste à juste raison. Elle aura son soutien, pas sa confiance ! Elle va devoir faire avec !

    -On commence tout de suite alors ! Lance l’intéressée d’un ton forcé, à défaut d’être convaincu !

    Mais comment faire autrement que de rentrer dans le jeu  tordu de la jeune femme, si elle veut l’aider à s’en sortir ?

    -Oui, le temps que je fasse manger Jacob et on y va !

    -Tu ne veux pas que je   m’en charge ?

    -Non, je m’en occupe !

    Elle est devenue réticente  à l’idée de  confier son fils à d’autres bras que les siens, elle doit bien se l’avouer !

    Sitôt dit, sitôt fait ! Elle est allée chercher son petit bonhomme dont le regard vert posé sur elle est si semblable à celui de son père. Après l’avoir habillé, elle l’assoit sur ses genoux pour lui faire avaler sa bouillie du matin.

    - Tu as dit on y va ! Nous n’allons donc pas le faire ici ? Lance Martha un rien vexée ! Elle adore ce bambin si facile à vivre !

    -Non !  Nous allons nous assurer de n’oublier personne en faisant le tour du village, maison par maison !

    - On ne te laissera pas entrer Élisa !

    -Je m’en doute bien hélas ! Et je n’ai nullement l’intention de frapper à chaque porte vois-tu ! A cette heure de la journée, la plupart des villageois sont encore chez eux.  La campagne de pêche ne démarre que dans deux jours et hormis Rafaël, et Khaled partis avec Jonathan, il ne manque aucun résident à Liberté. Il sera donc aisé de vérifier et d’établir la liste au fur et à mesure !

    -Je suis obligée d’admettre que tu as raison au moins sur ce point !

     - C’est déjà ça ! On y va alors !

    Elle a essuyé les dernières traces de bouillie autour de la bouche de Jacob, puis, bien qu’il sache marcher, elle l’a calé dans son porte-bébé ventral.

    Et les voilà en route pour une promenade matinale des plus incongrues ! C’est ce que pense Martha en tout cas !

    Tandis qu’elles avancent dans bon pas dans  la rue centrale du village, un bruit de voix leur parvient de  l’arrière de la Maison Commune. Elisa reconnaît sans peine le timbre bourru d’Andrew, la voix hautaine de Serena et celle dominatrice de Septime. Trois des « édiles » de Liberté. Trois des membres les plus influents de l’élite de « L’Arche », dont faisaient également partie Jonathan, Khaled et…Martha.

    -Vous croyez que ça va être possible ?  Demande Andrew

    Élisa stoppe net, intriguée par le ton du Doyen ! Elle pressent qu’elle vient de tomber par hasard sur une réunion au sommet, au beau milieu d’une conversation capitale et  secrète, elle en jurerait.

    Martha s’est arrêtée elle aussi. Elle la tire discrètement par le bras, lui intimant de garder de silence, l’index devant la bouche.

    -Viens ! Articule-t-elle  sans proférer un son.

    Elle désigne Jacob qui s’est endormi dans la poche ventrale du porte-bébé.

    Derrière la maison commune, les interlocuteurs d’Andrew mettent du temps à répondre, comme s’ils réfléchissaient. Ou peut-être parce qu’ils ont perçu les pas des promeneuses… Ça sent la conspiration à plein nez ! Mais contre qui ? Jonathan et Khaled peut-être, opportunément absents.. Martha aussi  qui, présente à Liberté devrait être avec ses trois anciens  comparses.

    Un complot ? Mais pourquoi ?

    Élisa se fige plus encore, à l’écoute…

    - La question n’est pas de savoir si ça va être possible, mais quand ! Lâche Septime avec hargne !

    - Exactement ! Renchérit Serena ! Cette situation ne peut continuer ! Il faut agir, vite ! Cela n’a déjà que trop duré !

    Martha se fait insistante  et tente de l’entraîner bon gré mal gré.

    Elle résiste cependant, désireuse d’en entendre d’avantage, intimement persuadée d’un coup, qu’elle est au centre de cette réunion de comploteurs.

    C’est la voix inquiète d’Andrew qui répond, confirmant son intuition.

    -Jonathan n’acceptera jamais !

    Puis celle, agressive de Serena  tranche dans le vif :

    -Voilà pourquoi il faut agir avant son retour. Khaled nous soutiendra et je fais mon affaire de Martha ! Je saurai la convaincre, soyez en assurés ! Et puis Jon' a beau être très épris de sa compagne, on le tient lui aussi ! Tout comme Martha au demeurant, vous l'avez oublié ?

    Que prépare-t-on contre elle ?

    Martha l’attend, tête basse.  Elle a tout d’une coupable !

    -Tu sais quelque chose que j’ignore ? Accuse-t-elle devant son air déconfit !

    -Viens, je t’en supplie ! Je te jure que je ne sais pas ce qui se trame mais je les connais !  S’ils te voient ici et qu’ils soupçonnent que tu les as entendus, je ne donne pas cher de ta peau !

    - Ils disent qu’ils vous tiennent Jonathan et toi ! Qu’ est-ce que ça veut dire ?

    -Je n’en sais rien, je te le jure !

    Leurs répliques ont eu lieu à voix basse. Convaincue du risque d’être découverte, elle se rend aux objurgations de Martha. Pour autant, la  guérisseuse ne perd rien pour attendre !

    Elles se sont éloignées rapidement en évitant de faire le moindre bruit ! Une chance que Jacob ne se soit pas réveillé.

    Liberté n’est pas si grande ! A la fin de la matinée, elles  ont la liste de tous les habitants du village, du plus jeune au plus âgé.

    550 présents, 3 absents et aucune nouvelle disparition.

    Une liste établie en double  dont les deux exemplaires sont signés de la main de la guérisseuse, à seule fin d’en attester l’authenticité. Elles les ont placés ensemble dans une urne scellée qu’elles ont cachée dans un lieu connu d’elles seules. Le tronc creux d’un arbre à l’orée de la forêt qui borde Liberté.

    Mais à quoi servira cette signature si Martha venait à disparaître comme les autres ?  Se demande  Élisa  avec angoisse. Et puis--je lui faire confiance ?

    La guérisseuse semble avoir deviné ses interrogations !

    -Tu m’as bien dit que les disparitions n’avaient lieu qu’au sein du village ? Que les personnes qui en sortent, reviennent toujours ?

    - Exact ! Et ne me demande pas pourquoi, je n’ai aucune explication logique !

    -Bien ! Donc, il ne me reste qu’une solution pour éviter de me volatiliser : quitter le village.

    -Et où irais-tu ?

    -Dans l’un des refuges que nous avons construits sur  le trajet entre l’Arche et Liberté. J’ai promis de t’aider ! Pour cela, je dois rester présente pour toi ! Et partir de mon plein gré, pas me volatiliser ! Je ne comprends rien à ton histoire mais je ne veux prendre aucun risque.

    - Ils vont accrocher quelqu’un d’autre à mes basques !  Parce que tu étais bien assignée à ma surveillance, si j’en crois leurs propos !

    -Je l’avoue, oui ! Et c’est plus que probable  qu’ils vont me remplacer! Par Mélodie peut-être ! Mais si ce que tu dis est vrai, mon départ ne ressemblera en rien à tes « disparitions », ce qui veut dire qu’ils se souviendront de moi et te poseront des questions sur mon absence, non ?

    -Je n’avais pas pensé à ça !

    -Cela aura un avantage certain  pour toi ! Pendant qu’ils seront occupés à me chercher, ils seront contraints de surseoir à leur projet en ce qui te concerne !

    -Quel projet ?

    - Je ne sais trop !   Ce que je sais en revanche, c’est que ces trois-là sont capables de tout !   

    -Tu me crois alors

    - Te croire, c’est vite dit ! Je te le répète, je ne comprends rien à ce qu’il t’arrive mais je te connais assez pour savoir que même si cela paraît impossible, voire totalement surréaliste, tu n’as pourtant rien inventé ! Tu es convaincue de ce que tu avances !  Et je dois savoir pourquoi !

    -Quand as-tu changé d’avis ?

    -En les entendant ce matin. Ça m’a fait froid dans le dos !  D’un seul coup  j’ai terriblement peur pour toi !

     >A suivre<                                                                  [Précédent]

     

     

     


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