• L'Arbre -Livre 1- Epilogue-Le Voyageur

    Le Voyageur

     

    Un jour, au hasard d’un de mes nombreux voyages, un jeune homme au regard mordoré, très beau, me parla de ce lieu enchanteur, m’enjoignant de partir à sa découverte.

    Je l’ai fait.

    Vous pouvez me croire ou me prendre pour un fou. Libre à vous. Chacun est maître de ses opinions et je me garderais bien d’essayer de convaincre les sceptiques. Je n’ai pas trop de temps à perdre pour une entreprise aussi assurément vouée à l’échec. Le temps dont je dispose, je le réserve à mes voyages, qu’ils soient réels ou imaginaires.

    Tout être humain qui possède la faculté de rêver devient comme moi un voyageur sans bagages. Tout rêveur est investi des pouvoirs magiques de l’imagination. Ces pouvoirs lui ouvrent mille portes secrètes, lui dévoilent les mystères des cités interdites, offrent à ses regards émerveillés des horizons nouveaux. Fort de ces pouvoirs, il escalade sans peine les plus vertigineux sommets, explore les forêts les plus inextricables, découvre les îles encore désertes, sonde les plus profonds abîmes…

    Pour moi, ils ont écarté les invisibles murs de la Cité- Jardin dont les hôtes ont accepté de me montrer leur vrai visage. Je suis irrémédiablement tombé sous leur charme. Ils m’ont si totalement séduit que j’ai posé mon bâton de pèlerin pour écouter leur histoire.

    Celle d’Arbre, tellement fou d’amour qu’il en a défié les lois sacrées de la Nature pour sauver l’humaine qu’il aimait.

    Celle de la Déesse aux verts cheveux que seule une extraordinaire métamorphose a pu rendre mère.

    Celle de Chat, le vieux matou borgne aux innombrables vies, doté d’une sagesse immémoriale.

    J’ai vu bourgeonner les Enfants-Arbres, j’ai vu leur éclosion quand ils sortent nus et verts de leurs cocons de branches. J’ai vu leurs lèvres émeraude aspirer goulûment la sève aux seins épanouis de leur mère. Je suis même resté assez longtemps pour en voir pousser quelques uns auprès de leur fratrie végétale née elle aussi de l’amour extraordinaire qui unit leurs parents. J’ai assisté subjugué à leur sevrage. Sitôt qu’ils sont capables de se tenir debout, ils quittent le téton maternel. Alors ils plantent leurs petits pieds profondément dans la terre, s’y enracinant pour y puiser leur nourriture.

    J’ai vu tous les miracles de la Cité-Jardin. J’ai vu et j’ai cru.

    Je suis un voyageur sans bagages.

    Je cède volontiers aux chants des sirènes, à l’appel du large, à l’appel du rêve…

    On me parlait de cet endroit depuis si longtemps que j’ai voulu voir de mes yeux voir.

    Et j’ai vu de mes yeux vu !

    Libre à vous de me croire ou de me traiter de fou. Cette histoire sera vraie si vous décidez qu’elle le soit. Sinon, brûlez ce livre.

    Qui sait ? Peut-être alors verrez-vous dans les flammes, la silhouette calcinée du grand pin de la montagne. Ou celle gigantesque et tordue d’Arbre enlacé par une femme si belle que vous aurez l’impression de mourir rien qu’en la regardant ?

    25 mars1998/30 novembre 2008

    Fin de la première partie

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  • Commentaires

    3
    Dimanche 4 Septembre 2022 à 21:54
    colettedc

    Une première partie qui se termine et nous tient en haleine pour une deuxième.

    Bonne soirée Anne-Marie,

    Bisous

    2
    Dimanche 4 Septembre 2022 à 13:17

    Et voilà un nouvel habitant de cette forêt magique, je veux y croire et j'attends la seconde partie. 

    Bon dimanche.

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    1
    Samedi 3 Septembre 2022 à 22:05

    Belle expression du rêveur, voyageur sans bagage, merci, bonne nuit, jill

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